On a dit de cette terre qu’elle est trois fois sainte. C’est à Hébron que se trouve le tombeau des patriarches des trois religions dites du livre, ou religions révélées. C’est à Jérusalem que se trouve le reste du grand temple des Juifs construit au 1er siècle après Jésus appelé le Mur des lamentations, et qui est le lieu le plus sacré pour les Juifs. C’est à Bethléem que David, roi d’Israël et Jésus le Sauveur des Chrétiens sont nés. C’est à Jérusalem que ce Sauveur fut crucifié, enterré et qu’il ressuscita. C’est toujours à Jérusalem que le Prophète Mahomet des Musulmans fit son voyage nocturne vers les sept cieux, sur son cheval Bouraq, en compagnie de l’ange Gabriel. Et c’est là que se trouve la mosquée d’al-Aqsa, le troisième lieu le plus saint de l’Islam. Ne devrait-il pas régner trois plus d’amour sur cette terre ?
Cette terre fut partagée entre deux peuples qui la réclamaient, deux peuples cousins, deux peuples frères, puisqu’ils se réclament tous deux des mêmes ancêtres, ceux qui sont enterrés à Hébron. En principe les deux peuples devraient vivre en harmonie, se fondre même pour n’en former qu’un. Qu’est-ce qui n’a pas marché ? De Gaza à Ramallah en passant par Jérusalem, Jénine, Hébron, Tel Aviv, Ashquelon, Haïfa, Nazareth, on n’entend que des tirs, des bruits de chars, de roquettes et de bombes, des pleurs et des appels à la haine. Deux peuples qui devraient s’aimer, se compléter pour être le sel de l’humanité. Tout ce qu’ils ont su développer est la détestation de l’autre. L’un écrase l’autre de sa toute puissance, et lui refuse même le droit d’exister. Et l’autre ne rêve que de vengeance, de roquettes à tirer. Peuple inexistant, a dit quelqu’un. Alors un peuple inexistant peut mourir et disparaitre sans que personne ne s’en émeuve. Et chaque jour, les enfants de Gaza, de Jénine, de Ramallah, de Bethléem, de Jérusalem, de Jéricho, de toute la Palestine meurent, et personne n’entend leurs cris de douleur. Normal. Ils n’existent pas. Et puis actuellement, un autre peuple, un vrai peuple celui-là, est en train de mourir aux portes de l’Europe occidentale. Pauvres Palestiniens ! Quelle idée de lancer des cailloux sur ces soldats, au moment où les Ukrainiens sont bombardés par les Russes avec de vraies bombes. Vous savez que lancer des cailloux, c’est du terrorisme. Et ça ne pardonne pas, ça. Et vos aînés n’ont pas trouvé mieux que de lancer des roquettes. La sanction, c’est la mort pour le lanceur de caillou et punition collective pour tout le reste du clan. Maisons détruites, brûlées, champs d’oliviers arrachés, interdiction de circuler.
Pauvres enfants de Gaza. La plus grande prison à ciel ouvert du monde. Tout y est pollué. Le ciel est pollué, la terre est polluée, l’eau est polluée, l’air est pollué. Souffrez en silence, mourez en silence s’il vous plait. Pauvres enfants de Ramallah, d’Hébron, de Naplouse, de Jéricho, de Bethléem. Pour vous ce n’est pas œil pour œil, dent pour dent, mais beaucoup de têtes éclatées et beaucoup de maisons incendiées pour un œil ou une dent.
« I can’t breathe ». Je ne peux plus respirer, disait le Noir américain George Floyd lorsqu’il étouffait sous le genou du policier raciste blanc. Il y a longtemps que les Palestiniens ne peuvent plus respirer sous le genou de l’occupant. Ils étouffent depuis toujours. Il y a longtemps que les enfants de Palestine ne jouent plus, ne sourient plus, ne rient plus. Ils ne pleurent plus non plus. A quoi cela servirait-il ? Personne ne les regarde, personne ne les voit, personne ne les écoute, personne ne les entend. Puisqu’ils n’existent pas.
Une solution à deux Etats avait-on dit ? Quel futur Etat palestinien lorsque Gaza est régulièrement bombardée à l’approche de chaque élection ou quand il y a crise de l’autre côté, en Israël, lorsque la Cisjordanie est pratiquement entièrement occupée par les colonies israéliennes ? Regardez sur une carte et voyez ce qui reste aux Palestiniens pour créer leur Etat. De toutes les façons personne n’en veut, de cet Etat palestinien. Ni en Israël, ni aux Etats Unis, les grands maîtres du jeu. Ni peut-être même chez les frères arabes du coin. Alors ? Alors les enfants de Palestine continueront de mourir et personne ne lèvera le sourcil. Rappelons quand même qu’il y a quelques années, une équipe médicale palestinienne est venue soigner gratuitement des malades dans notre pays. Ils leur ont redonné le sourire. Ayons une pensée pour leurs enfants qui eux, ne savent plus sourire. Et, en ces temps de carêmes musulman et chrétien, de pâques juive et de mort et résurrection du Christ, prions pour que la paix revienne sur cette terre et entre ces deux peuples que tout devrait lier à vie.
Par Venance Konan