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TRIBUNE – AFRIQUE : Mohamed Bazoum ou « le prisonnier de la Démocratie » au Niger

L’ex-Président du Niger, Mohamed Bazoum, vient de passer plus d’un an séquestré par les militaires qui l’ont déchu. Non content de s’arroger son Pouvoir, le Général-Président Abdourahamane Tiani et ses hommes, l’accusent de « complots ». Sans même sourciller sur le ridicule, tant il est grand comme l’Himalaya. Et la liste des « complots » est longue : « complot d’attentat à la sécurité et à l’autorité de l’Etat, de crime de trahison, d’apologie du terrorisme et de financement du terrorisme » pour « le prisonnier de la Démocratie » au Niger.

Qu’on le veuille ou non, le Président déchu du Niger, Mohamed Bazoum, est devenu aujourd’hui la figure emblématique du combat en faveur de la Démocratie en Afrique. On a beau entourer sa détention d’un silence assourdissant au sein de ses anciens pairs. Et les Nigériens en même temps que les Africains devraient encore se poser beaucoup de questions pendant longtemps en se regardant dans le miroir de leur propre Histoire.

A la BBC, Moussa Coulibaly, l’avocat de l’ancien Président Mohamed Bazoum n’est pas allé par quatre chemins, pour rappeler à la mémoire de tous qu’il y a un an, la Démocratie a été assassinée au Niger. Mais il a aussi assené à tous ceux qui ont détourné le regard du Niger ou ceux qui sont sourds à ce qu’il s’y passe et en particulier concernant le sort de Mohamed Bazoum. « Il sera jugé par un tribunal spécial qui ne sera ni indépendant ni impartial et il risque la peine de mort par fusillade s'il est reconnu coupable. On peut dire sans risque de se tromper qu'il n'y a plus d'État de droit au Niger », a-t-il déclaré en parlant du simulacre de justice orchestré par les militaires au Pouvoir contre l’ex-Président Mohamed Bazoum.

Même si beaucoup semble l’avoir oublié, l’ex-Président Mohamed Bazoum, victime expiatoire de l’incapacité des militaires à venir à bout du terrorisme qui sévit dans le pays, est sans aucun doute un Prisonnier de la Démocratie au Niger. Le Général Abdourahamane Tiani, qui s’est arrogé le Pouvoir et ses hommes ne parviendront jamais à faire écrire une autre version dans les annales de l’Histoire de l’Afrique que celle de l’une des pires façons de s’accaparer du Pouvoir. Pire que lors d’un coup d’Etat classique, il s’est agi plutôt d’une prise en otage pour dire carrément les choses par leurs noms, non seulement du Président de la République en son temps, mais aussi de toute sa famille. Et quid de l’honneur des militaires que d’embarquer, dans leur velléité de chantage pour conserver le Pouvoir, des civils d’une famille qui n’a manifestement rien à voir avec la fonction de Président de la République et Chef de l’Etat intimement associée à la personne de Mohamed Bazoum.

Longtemps après la séquestration le 26 juillet 2023 de Mohamed Bazoum et de sa famille qui s’est muée en le coup d’Etat, le fils Salem Mohamed Bazoum pris en otage en même temps que la Première Dame, Khadija Bazoum, a été libéré en janvier 2024. Après moult tractations dont le Président Faure Gnassingbé du Togo seul détient les secrets en tant que Médiateur attitré des Militaires putschistes du Mali, du Burkina et du Niger.

L’Afrique de l’Ouest, l’Afrique toute entière, et le monde entier ne saurait oublier dorénavant le plus célèbre « Prisonnier de la Démocratie » en Afrique et qui est l’otage d’un Pouvoir militaire du Général Abdourahamane Tiani au Niger. Car c’est exactement de cela qu’il s’agit. C’est l’Hôpital qui se moque de la Charité que ceux qui ont arraché la Souveraineté du peuple du Niger dont l’ex-Président Mohamed Bazoum était le dépositaire légal et légitime soient ceux qui l’accusent en fin de compte de « Complot ». A savoir de « complot d’attentat à la sécurité et à l’autorité de l’Etat, de crime de trahison, d’apologie du terrorisme et de financement du terrorisme » et tutti quanti...

N'eût été les lâchetés manifestes à l’intérieur du Niger, les lâchetés au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et les lâchetés au niveau de l’Union africaine (UA), rien de tout cela n’aurait été possible. Des sommes de lâchetés qui remettent en cause fondamentalement l’apprentissage et la consolidation de la démocratie non seulement au Niger mais dans toute l’Afrique de l’Ouest, et par voie de contagion dans toute l’Afrique. En lieu et place de l’Etat de droit, l’on est en train de voir émerger des Dictatures militaires ou militaro-civils çà et là, soutenues implicitement ou non par la Russie, la Chine, l’Iran, la Turquie. Toutes choses qui viennent tout simplement annihiler les efforts des peuples africains pour installer l’Etat de droit et le respect des libertés individuelles et collectives dans leur quotidien. Ces Pouvoirs autocratiques qui sont en train de s’illustrer actuellement par maintes exactions, disparitions de citoyens et autres arrestations arbitraires commencent, en effet, à montrer leurs vrais visages. Le temps des désillusions est venu pour tous ceux qui croyaient béatement à l’antienne révolutionnaire et anti-Occident. Ou bien d’autres slogans au nom de la Souveraineté nationale et de la libération de la France néo-coloniale qu’ils entonnaient sans même réfléchir.

Au-delà de la passivité et voire de l’impuissance des institutions sous-régionales et continentales sur l’avènement des militaires au Pouvoir avec son cortège de malheurs, il convient tout aussi de montrer du doigt l’inorganisation de la Société civile en Afrique de l’Ouest. Laquelle devrait se dresser, non seulement quand il est nécessaire au plan national mais aussi concernant tous les pays de la CEDEAO, dès lors qu’il s’agit de tous agissements contraires à la Démocratie et à l’Etat de droit, et cela par devoir de solidarité et d’unité dans le combat. Pour que les valeurs démocratiques s’enracinent résolument dans chaque pays en Afrique de l’Ouest en particulier et en Afrique en général, les peuples africains ne pourront pas faire l’économie d’une Société civile forte, solidaire et unie au-delà même des frontières nationales sur ce qu’il conviendrait d’appeler un « Minimum Démocratique Commun ». Car, contrairement à ce que certains voudraient faire croire aux peuples africains, la Démocratie n’est pas importée de l’Occident ou encore moins un luxe pour l’Afrique. Elle est bel et bien née en Afrique tout comme la première Confédération politique de l’Histoire de l’Humanité. En revanche, ce qui est né en Occident, et plus précisément en Grèce, c’est le mode de scrutin qui s’est généralisé à travers le monde. Et la nuance est d’importance pour tous ceux qui voudraient imposer des Dictatures aux peuples africains.

Par Serge Félix N’Piénikoua

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