«Je vous serai plus utile dehors que dedans ». C’est la réponse qu’a servie Deo Gratias Kindoho quand on lui a proposé un poste à la présidence, au lendemain de la victoire du candidat Talon en 2016. Ce niet à une telle proposition, à ce moment-là, peint avec perfection la personnalité de l’ex journaliste de Radio Bénin. Tourner dos à une fonction politique juteuse, il faut avoir des principes robustes pour le faire. On a donc là, un homme qui ne marchandise pas ses combats. L’un des rares qu’on peut encore identifier publiquement dans cette nation.
Dans son deuxième essai, après le célèbre Hors Antenne, M. Kindoho a d’abord prouvé la constance dans ses idées et opinions. Le verbe ‘’prouver’’ est exagéré ici, mais j’assume son emploi pour faciliter mon argumentaire. L’auteur n’avait, évidemment, rien à prouver à personne. Mais quand on tourne la dernière page d’Un enfant du Bénin debout, on est sûr d’avoir lu des chroniques virulentes braquées contre les tares du Yayisme et du Talonisme.
Voici le constat, si vous ne m’avez pas vu venir : ce n’est pas un monsieur qui a dealé avec le régime Yayi, à qui la rupture aurait coupé le biberon à son avènement et qui justifierait son activisme anti-Rupture d’aujourd’hui. Il a d’ailleurs participé, à son échelle, à la chute de la ‘’refondation’’ couplée au ‘’changement’’. L’on n’a pas non plus l’impression qu’il se faisait (ou se fait actuellement) financer par l’opposition à ces deux régimes pour écrire ce qu’il écrivait (et continue d’écrire) avec autant d’audace. La preuve, il a dirigé sa plume contre les actes condamnables d’opposants durant toutes ces années. Il ne ménageait personne. Et ça, c’est admirable.
Admirable surtout qu’à un moment, le chroniqueur qu’il était, s’est dit que passer son temps à ne faire que dénoncer est trop facile. Faudra faire un choix et l’assumer pour une fois. Il a fait un choix pour 2016. Il s’est donné avec énergie et conviction à un projet de société. S’est opposé à des financements dans ce sens. Il soutenait le Nouveau Départ parce que c’était le projet qui était le plus abouti à ses yeux. À l’arrivée, ça a payé. Mais c’était en comptant (avec imprudence tout de même ?) sur la nature caméléon des hommes politiques. Entre le candidat et l’homme qui a désormais le pouvoir, le fossé s’est vite creusé. Ce qui a fait que nous avons aujourd’hui un Deo toujours prêt à dégainer sa plume encore et toujours contre les manquements contre la démocratie et l’Etat de droit.
534 pages pour 534 partages…
Partage de ces affaires d’État lointaines et récentes qui auraient pu conduire notre pays dans l’irréparable. Partage de ces moments historiques, où l’on a voulu prendre les Béninois pour des briques de quinze. Partage du courage du peuple béninois dans certaines situations difficiles. Partage des noms de ces personnalités qui ont fait preuve de débilité inqualifiable ou preuve de courage. Partage de l’amour inconditionnel pour la patrie. Si certains pensent que le temps effacerait les actes ignobles qu’ils ont commis et qui nous auraient coûté cher, Un enfant du Bénin debout est là pour rappeler que tout le monde n'a pas oublié. Chaque lecteur qui prendra son exemplaire, se rappellera certaines choses s’il était déjà adulte en ces temps passés, ou lira l’histoire, s’il était encore jeune ou enfant. Y’a des passages qui révoltent, qui rendent triste, qui font sourire, ou rire de colère.
Ce livre est un fil conducteur qui nous présente la naissance et la chute du Yayisme jusqu’à la naissance du Talonisme. Remettre les choses dans leur contexte est nécessaire dans un monde où la culture de l’instant prime sur la réflexion et l’histoire. Deo semble nous dire à travers ses écrits que l’on vient de loin et que commettre les mêmes erreurs produira les mêmes effets. Veut-on évoluer ou reculer ? Notre vivre-ensemble dépend absolument des éveilleurs de conscience, qui le font surtout par conviction.
Même si vous êtes seul et que personne ne vous suit, défendez toujours ce qui vous paraît juste.
Défendre ce qui est juste, c’est combattre d’abord ce qui est injuste. Et ce qui est injuste saute souvent à l’œil. Se taire pendant qu’on piétine les autres, c’est courir le risque de se faire écraser à son tour. Défendre l’autre c’est surtout se défendre. Se taire et se jouer apolitique pendant qu’on chiffonne et bafoue les lois de la République, c’est prendre le risque de tout perdre. Si tu ne fais pas la politique, elle te fera. Car elle est partout, elle est tout. Se taire, c’est ce que M. Kindoho ne sait pas faire. Fermer les yeux pendant qu’on commet l’injustice à côté, en quinze ans d’activisme, il n’a pas su le faire. Contrairement à d’autres qui, hier dénonçaient une chose et aujourd’hui applaudissent la même chose en pire, lui, il est resté constant. Droit et debout dans ses bottes.
J’ai fini la lecture de ce livre écrit avec une plume remarquable. Je garde une leçon principale de ces 500 pages de démonstration d’amour à sa nation par un citoyen. Cette leçon n’est pas livrée explicitement dans l’ouvrage mais peut se lire à chaque ligne. La voici : faire bien ce que l’on fait, être sûr de ses compétences pour ne pas céder à la tentation de l’argent facile au détriment de son propre bonheur et de ses principes et valeurs. Ça permet de rester intègre et inébranlable. On me dira que ce sont les valeurs de ceux qui veulent mourir pauvre. Deo leur répondra probablement : je préfère la liberté à l'indignité ! Eh oui, c’est celui qui n’est sûr ni de lui-même, ni de ses compétences, qui va lécher les talons du premier venu.
Par Mahussi Capo-chichi
Détails du produit
• Éditeur : Super Format (17 juin 2024)
• Langue : Français
• Broché : 534 pages
• ISBN-10 : 999826703X
• ISBN-13 : 978-9998267039
• Poids de l'article : 2,04 livres
• Dimensions : 6,14 x 1,34 x 9,21 pouces
