« …à qui vendons-nous les actions gouvernementales à longueur de journaux si personne ne les écoute, ni ne les regarde vraiment ? » Plus j’évoluais dans ma lecture, plus je me posais cette question sans savoir que je la partageais avec l’auteur.
Je confesse, je l’avoue publiquement : la dernière fois que je me suis posé pour regarder 5 min du journal télévisé sur notre très chère chaîne nationale remonte à deux ans. Et je ne suis pas le seul, dans notre maison, à part notre père, personne ne regarde depuis plusieurs mois déjà. Si c’est ainsi chez nous, c’est que ça doit être le cas dans nombreux autres foyers à travers le pays. Tu regardes le journal et tu te demandes « euh…C’est vraiment du Bénin qu’ils parlent ? ».
J’ai fini la lecture de Hors Antenne de Deo ce matin tout cassé. Tout journaliste attaché aux règles basiques du journalisme qui le lira, aura également le même sentiment.
Partout dans le monde et surtout au Bénin, lorsque certaines personnes sont nommées à un poste de responsabilité, elles poussent des zèles et volent dans tous les sens. Elles se voient en Daenerys Targaryen assit sur l’un de ses dragons pour crier ‘’Dracarys’’ afin de cracher le feu sur tous ceux qui essaient de résister face à leurs dérives.
Je ne peux pas comprendre qu’on puisse pourrir la vie professionnelle, voire personnelle de quelqu’un qui ne demande que le respect de la déontologie dans son organe. Depuis quand le respect de la déontologie est devenu un crime ? C'est pourtant la moindre des choses qu'on puisse demander. Je vais m’attarder sur l’équilibre de l’information en journalisme. Si les auditeurs, téléspectateurs ou lecteurs prennent un organe de presse au sérieux et le suivent régulièrement, c’est qu’ils ont l’assurance d’entendre le son de cloche de chaque partie d’un fait d’actualité dans leur traitement. Si l’idée, c’est de faire croire aux populations que tout va bien dans le pays, c’est que c’est un projet mort-né. Les gens ne sont pas cons et ils iront chercher le reste de l’info ailleurs.
S’il faut être nommé pour ne plus être libre d’avoir un minimum d’honneur, de valeurs et de principes , c’est qu’on devient un esclave et c’est bien dommage. Étudier des années pour bâtir une carrière et finir en marionnette, ne fait pas rêver les esprits libres.
C’est vrai que face à l’argent et la gloire, on est très sensible et le mieux à faire, c’est de poser une limite à ne pas franchir au niveau de sa conscience. Il faut pouvoir rentrer chez soi le soir et fermer l'œil la conscience un peu tranquille. L’argent ne peut jamais sauver une personne qui a honte d’elle-même intérieurement, mais qui doit porter un masque pour prouver le contraire au jour le jour. Je me sens gêné d’être en train de donner un tel conseil à des gens qui ont l’âge de mon père. C’est déchirant.
Un livre à imposer dans les écoles de Journalisme
Alors que dire de ce livre ? Déjà, l’auteur a une belle plume, ce n’est plus un secret pour ceux qui ont pris l’habitude de le lire ici. Ensuite, il a utilisé un style simple : phrases courtes mais percutantes. Beaucoup d’anecdotes qui arrachent le sourire page après page. L’auteur s’est ouvert à ses lecteurs, a parlé de lui, de son enfance, de ses débuts dans le journalisme, de ses difficultés. Il a surtout tenu à donner sa version de ce qui s’est passé jusqu’à sa radiation de l’ORTB.
Mis à part ces récits croustillants, l’essayiste a pris des pages à donner ce que je vais appeler un ''cours de journalisme''. Il a balayé plusieurs thématiques : l’éthique, les différents types de journalisme qui existe, la presse face aux réseaux sociaux, la différence entre médias publics et médias d’Etat, l’anti-journalisme, etc. J’ai suivi trois ans de cours de journalisme à l’ENSTIC et franchement, je peux vous dire que j’ai retrouvé une bonne partie de ce qu’on nous a enseigné dans ce bouquin.
Tout étudiant en journalisme et qui en est vraiment passionné devrait l’acheter sans hésiter. L’auteur a même prodigué des conseils aux jeunes qui ont envie d’embrasser cette profession. Je crois d’ailleurs que nos écoles de journalisme devraient recruter Monsieur Kindoho comme enseignant. Pour ce que j’ai lu, il a largement les compétences pour former nos futurs journalistes et il n’a même pas besoin de déposer un CV pour ça, son livre parle pour lui, sa carrière aussi.
L’autre trésor que contient ce livre et que je tiens à souligner, c’est la capacité de l’auteur à identifier les problèmes de cette profession au Bénin et à y apporter des approches de solutions. C’est vraiment louable.
J’ai passé un bon moment de lecture et s’il faut que je donne une note sur 10, je n’hésiterai pas à mettre un 09. Bravo pour ce courage!
Par Mahussi Capo-Chichi