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POLITIQUE/GUINEE - TRANSITION: De l’espoir suscité par la junte militaire aux doutes sur ses ambitions

Le Président de la Guinée, le Colonel Mamady Doumbouya

Depuis le coup d’Etat inattendu et salvateur pour beaucoup de Guinéens et surtout la classe politique en particulier, la junte militaire a promis une refondation vers un renouveau démocratique. Le Lieutenant-Colonel Mamady Doumbouya, tombeur de  l’ex-président Alpha Condé, et ses hommes du Comité national pour le rassemblement et le développement (CNRD), semblaient résolument sur la bonne voie. Mais depuis quelques mois déjà, l’on est en droit de se poser bien des questions sur les réels objectifs de la junte militaire, au regard de sa gestion du pouvoir.

« C’est le lieu pour moi de remercier tous ceux qui ont contribué à la réussite de ces différents travaux. Chaque Guinéen a droit à la parole, l'avis de tout le monde compte. C'est la volonté de la majorité qui tranche les contradictions. Il ressort une proposition médiane d'une durée consensuelle de la transition de 39 mois. Le CNRD et le gouvernement à leur tour soumettront au CNT (Ndlr : Conseil national de transition), qui tient lieu de Parlement, cette proposition qui est consécutive à de larges et patientes concertations. »

Ce sont, entre autres, les propos que le Colonel Mamady Doumbouya a tenus lors d’un discours à la Nation à l’intention des Guinées le 30 avril. Non sans préciser qu’il ne décide pas seul, qu’il agit avec tout le monde. Invoquant, au passage, les journées nationales de concertation, les assises nationales et maintenant le cadre de concertation et de dialogue, qui ont rendu ces conclusions provisoires, ajoute-t-il. Reste à savoir comment la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) prendra cette annonce. L’institution qui ayant auparavant réclamé une Transition la plus courte possible.

Après le coup d’Etat qui a renversé l’ex-Président Alpha Condé le 5 septembre 2021, la junte militaire au pouvoir avait suscité beaucoup d’espoirs quant à la mise du pays sur le chemin de la démocratie et le plus tôt que possible. D’autant plus que, contrairement à bien d’autres pays, la Guinée ne connaît pas les affres du Jihadisme et autres actes terroristes qui ont conduit à des coups d’Etat au Mali et au Bukina Faso.

Au lendemain du coup d’Etat, le pays s’était d’abord dotée d’un Premier ministre en la personne de Mohamed Béavogui, un haut fonctionnaire international. Comme promis, le Président Mamady Doumbouya l’avait nommé pour conduire le Gouvernement  de la Transition, en tant que personnalité au profil dit de technocrate. Loin des chicaneries politiques du pays.

Ancien Sous-secrétaire général de l’ONU chargé de la mutuelle panafricaine de gestion des risques, fonctionnaire du Fonds international du développement agricole (FIDA), et du FAO, c’est un homme pétri d’expériences dans le système des Nations Unies qui a été préféré par le Comité national pour le rassemblement et le développement (CNRD). A charge à lui de mener la Guinée à bon port selon le calendrier esquissé. En guise d’organe législatif, le Conseil national de transition (CNT) sera à ses côtés afin de remettre ensemble le pays sur les rails de la démocratie. Laquelle a été sérieusement malmenée avec le troisième mandat de l’ex-Président Alpha Condé par un processus biaisé sur fond de violences politiques et de violation des Droits de l’Homme.

Après avoir consulté les Guinéens, le CNRD a élaboré et annoncé les grandes lignes de la Transition qui devrait conduire à un retour de l’ordre constitutionnel. Avec à la clef, la mise en place des organes nécessaires à l’organisation notamment d’une élection présidentielle. Le chemin qui mène à cet objectif est long et jalonné d’embûches. Vu qu’il faut une nouvelle Constitution à proposer aux Guinéens pour son adoption par voie référendaire. L’élaboration d’un calendrier électoral avec les outils qui accompagnent la préparation des futures élections qu’elles soient locales ou nationales.

Comme on pouvait s’en rendre compte, le CNRD avait déjà balisé le terrain avec la mise à l’écart systématique de celles et ceux qui ont cautionné ou pris part au troisième mandat de l’ex-Président Alpha Condé du processus de Transition ainsi que des autres institutions. Il en était de même des futures élections auxquelles les membres du CNRD, y compris, ne pourront pas se présenter.

Aux yeux des peuples de l’Afrique de l’Ouest, quelque chose de nouveau était en train de se construire en Guinée. La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ayant perdu tout crédit à faire respecter aux chefs d’Etat et de Gouvernement membres, les engagements qui sont les siennes en matière de démocratie et d’élections transparentes.

Lors des consultations en vue de la mise en place du processus de transition, le Président Mamady Doumbouya avait déclaré : « Nous ne tolérons aucune exclusion, nous ne tolérons aucun calcul individuel et partisan, nous ne tolérons aucune stratégie partisane. Le seul calendrier qui vaille est celui du peuple de Guinée qui a tant souffert ». Et les Guinéens ainsi que des ressortissants de l’Afrique de l’Ouest s’étaient pris à rêver que la junte militaire au pouvoir irait jusqu’au bout de ses engagements au nom de l’intérêt supérieur de la Guinée et des Guinéens, en faisant de ces derniers les seuls souverains et du Renouveau démocratique la seule ambition de son coup d’Etat. En somme, en refusant la tentation du pouvoir sous quelque prétexte. Avec la durée de la Transition ainsi annoncée, l’on est déjà bien loin des bonnes intentions et des professions de foi du début. A l’enthousiasme des premières heures qui succèdent le coup d’Etat, les mesures populistes des militaires pour rassurer les citoyens du pays et la CEDEAO ont fait long feu.

Par Moctar Diallo

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