Peu après sa victoire à la dernière présidentielle en Gambie en décembre dernier, le Président Adama Barrow devra composer avec nombres anciens pontes du régime déchu de Yahya Jammeh. A défaut d’une majorité au Parlement, beaucoup de Gambiens craignent ainsi de voir littéralement anéantis, du jour au lendemain, tous leurs efforts de se faire rendre justice pout différentes exactions et crimes commis pendant les 22 ans de dictature de Yahya Jammeh.
Plusieurs Gambiens se demandent dorénavant si le Président Adama Barrow qui vient de se faire réélire avec 53% des suffrages va suivre ou non les recommandations de la commission ayant enquêté sur la dictature de l’ex-Président Yahya Jammeh. Cette dernière a en effet demandé que les auteurs de crimes commis à cette époque soient traduits devant les tribunaux pour répondre des faits qui leurs sont reprochés.
Parmi eux, il y a Fabakary Tombong Jatta, un ancien proche du dictateur Yahya Jammeh qui a été nommé le 14 avril dernier par les députés en tant que président du Parlement. Au point de susciter immédiatement de nombreuses appréhensions et inquiétudes à travers le pays, voire à l’étranger.
On se souvient que le régime déchu de Yahya Jammeh s’était particulièrement illustré au cours de ses 22 ans comme l’un des plus dictatoriaux, les plus brutaux et sanguinaires d’Afrique. Parmi les plus sinistres atrocités à lui reprochées, on compte des enlèvements et tortures, des viols et castrations, des disparitions forcées, des assassinats…
Pour permettre d’élucider toutes ces exactions et ces crimes, une Commission Vérité, Réconciliation et Réparations (TRRC) avait été mise en place et s’est acquittée de sa mission. Elle a ainsi permis de constituer un dossier sur la foi de plusieurs témoignages de Gambiens à travers le pays. Avec à la clef des audiences télévisées pour mettre tous les Gambiens au même diapason de l’information. Résultat : un volumineux rapport en 17 volumes que la TRRC a mis entre les mains du Président Adama Barrowa comme une patate chaude. Avec une recommandation expresse : « la poursuite de Yahya Jammeh et de ses complices devant un tribunal international, dans un pays d'Afrique de l'Ouest autre que la Gambie ». Aux motifs notamment de « meurtres, détentions arbitraires, disparitions ».
Ayesha Jammeh, la nièce du dictateur Yahya Jammeh qui attribue la disparition de son père et de l’une de ses tantes à son oncle, il n’y a plus grand-chose à attendre des recommandations de la TRRC avec le retour des alliés de Yahya Jammeh aux côtés du Président Adama Barrow. Sauf à espérer que des pays étranger se saisissent de ces dossiers en faisant valoir le « recours au principe de la compétence universelle » ainsi que l'Allemagne a coutume de le faire désormais. Autrement, on ne voit pas comment le régime du Président Adama Barrow pourrait aller jusqu’au bout des recommandations de la Commission Vérité, Réconciliation et Réparations (TRRC) sans en être volontairement ou involontairement empêché par ses nouveaux alliés. Maintenant qu’il a les mains plus liés, faute de majorité absolue au Parlement.
Par Ousman Mbaye