Il y a tant à apprendre, encore aujourd’hui, surtout aujourd’hui, de ce mémorable discours de Barack Obama à l’Afrique. Serge Mathias Tomondji pense fortement que les générations actuelles devraient en saisir la quintessence afin de revendiquer, à travers l’élégance du comportement et de l’action, «l’avenir que tant de personnes des générations précédentes n’ont jamais réalisé…»
C’était un discours très attendu et qui a tenu toutes ses promesses. C’était un discours on ne peut plus solennel, déclamé devant les parlementaires ghanéens. C’était un discours dans l’air du temps, pour l’Afrique et pour les Africains, avec un rien de « Yes you can » qui a valeur d’exhortation. C’était le discours de Barack Obama, alors président des États-Unis d’Amérique, qui effectuait sa première visite officielle en Afrique noire.
Et j’en parle encore aujourd’hui, treize ans jour pour jour après, parce que ce Barack Obama-là était le fils d’un émigré kényan devenu premier Noir à accéder, à l’issue d’élections démocratiques, à la Maison-Blanche. J’en parle aussi, surtout, parce que pour moi, ce discours du 11 juillet 2009 reste des plus actuels et l’interpellation qu’il véhicule des plus cruciales.
L’on y apprend ainsi que les jeunes doivent tracer les sillons de la nouvelle Afrique de nos rêves. Au-delà du Ghana où il se trouvait, et du Kenya de ses pères, Barack Obama a indiqué que… «ce ne seront pas de grandes personnalités telles que Nkrumah et Kenyatta qui décideront du destin de l’Afrique, (mais plutôt) les jeunes, débordant de talent, d’énergie et d’espoir, qui pourront revendiquer l’avenir que tant de personnes des générations précédentes n’ont jamais réalisé».
INSTITUTIONS FORTES
Ce faisant, le chef de l’Exécutif américain avait alors placé le continent africain dans une riche perspective, comptant sur son énorme capital jeunesse pour relever les défis qui se posent à lui. Aujourd’hui encore, la jeunesse africaine est gravement interpellée sur ses rôle et missions de catalyseur d’une Afrique plus sereine, plus unie, davantage sur les rails de la bonne gouvernance et d’une démocratie mieux comprise et profitable à tous.
Indubitablement, il y a treize ans, à Accra, Barack Obama a placé l’Afrique devant le miroir de son passé, tout en la projetant dans une vision pertinente pour son avenir. Car en effet, avait-il martelé, «l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes». Une profession de foi restée célèbre jusqu’à aujourd’hui, éprouvée du reste par les merveilleux exemples du Kenya et du Malawi, où l’on a vu des institutions fortes faire reprendre des élections présidentielles, qui avaient consacré des hommes qui se croyaient forts.
Mais c’est sûr, ces exemples restent marginaux et dans l’embrouillamini sociopolitique des coups d’État de retour dans certains pays du continent, on peut bien se demander si l’Afrique n’est pas à jamais hanté par le mythe de Sisyphe! Et pourtant, il faut le savoir, si «chaque nation façonne la démocratie à sa manière, conformément à ses traditions, les gouvernements qui respectent la volonté de leur peuple, qui gouvernent par le consentement et non par la coercition, sont plus prospères, plus stables et plus florissants que ceux qui ne le font pas». En serinant cette vérité à son auditoire, Barack Obama a également fustigé, le 11 juillet 2009 à Accra, «ceux qui se servent des coups d’État ou qui modifient les Constitutions pour rester au pouvoir».
QUINTESSENCE
Une vérité en appelant une autre, celui dont le père «a grandi dans un tout petit village où il gardait des chèvres, à une distance impossible des universités américaines où il irait faire des études» a encore professé qu’aucun pays ne peut «créer de richesse si ses dirigeants exploitent l’économie pour s’enrichir personnellement, ou si des policiers peuvent être achetés par des trafiquants de drogue». Mieux, a-t-il encore affirmé avec justesse, «personne ne veut vivre dans une société où la règle de droit cède la place à la loi du plus fort et à la corruption. Ce n’est pas de la démocratie, c’est de la tyrannie, même si de temps en temps on y sème une élection çà et là, et il est temps que ce style de gouvernement disparaisse».
Il y a tant à apprendre, encore aujourd’hui, surtout aujourd’hui, de ce mémorable discours de Barack Obama à l’Afrique. Les générations actuelles, je le pense fortement, devraient en saisir la quintessence afin de revendiquer, à travers l’élégance du comportement et de l’action, «l’avenir que tant de personnes des générations précédentes n’ont jamais réalisé…»
© Serge Mathias Tomondji
Ouagadougou, 11 juillet 2022