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SOCIETE/Art de vivre - Malek Chebel, l’islamologue qui défendait un « Islam des Lumières »

Iconoclaste mais perspicace, diplômé en Anthropologie, Psychanalyse, Philosophie et Sciences politiques, l’essayiste d’origine algérienne Malek Chebel, ardent défenseur d'un « Islam des Lumières », est décédé le samedi 12 novembre à Paris d'un cancer à l'âge de 63 ans. Mais il a légué une immense œuvre à la postérité et permis à beaucoup de gens à travers le monde de mieux comprendre que l’Islam, c’est tout autre chose que le Jihadisme et le Terrorisme.

Anthropologue des religions, psychanalyste Malek Chebel était un intellectuel et un spécialiste de l’Islam connu à travers le monde entier. Cet Algérien d’origine, avait fait l’option de dépoussiérer les textes de l’Islam et de les rendre le plus accessible possible. Pour donner aux Mahométans et à tous ceux qui s’intéressent à la société musulmane des outils afin de mieux comprendre cette religion et d’éviter tous les amalgames qui l’entourent et font fantasmer bien des gens. Y compris certains musulmans.

Le 12 novembre 2016, s’éteignait à Paris Malek Chebel à l'âge de 63 ans, des suites d’un cancer. Son corps sera retourné dans son Algérie natale pour reposer là où il est né en 1953, à Philippeville, aujourd’hui appelée Skikda.

Après un Baccalauréat, option Philosophie et Lettres arabes, Malek Chebel a débuté ses études universitaires en 1973 à l'Université de Constantine en Algérie. Quand il soutient son mémoire de Licence en Psychologie clinique, il est le major de sa promotion. C’est avec une bourse d’études à lui accordée par le Consulat de France à Alger qu’il débarque en France en 1977, plus exactement à Paris. Un premier Doctorat en Psychopathologie clinique et Psychanalyse à l'Université Paris en 1980. Et un deuxième Doctorat d'Ethnologie à Jussieu en 1982. Et Malek Chebel ne va pas s’arrêter là. En 1984, il fait un troisième Doctorat en Sciences politiques à l'Institut d'études politiques de Paris.

Malek Chebel est célèbre internationalement pour être l'auteur de plusieurs ouvrages pédagogiques sur l’Islam notamment et le Traducteur du Coran. L'islam pour les nuls et Le Coran pour les nuls qui furent un succès de librairie après les attentats meurtriers de Paris, en janvier 2015, font partie de ses publications.

Du reste, peu après ce retentissant attentat de Charlie Hebdo, il avait réagi en invoquant le fait que la communauté musulmane était elle-même otage du monstre qu’est devenu le terrorisme. Aussi, avait-il, avec la perspicacité et l’intelligence qui le caractérisaient, insisté pour dire à la presse que le monde musulman avait mis du temps pour reconnaître les racines du mal : « L'islam n'est pas en cause (…) Ce sont les musulmans qui l'interprètent mal qu'il faut isoler et faire taire », n’avait-il de cesse de déclarer.

A travers sa fonction d’Enseignant, mais également de Conférencier, Malek Chebel s’est attaché tout au long de sa vie à transmettre ses Savoirs pour un monde plus tolérant à travers ses peuples les uns envers les autres. Entre autres hauts lieux de son enseignement, on peut citer ses conférences en Europe, dans le monde arabe et aux Amériques dans de nombreuses: dans des universités ; Université Paris Sorbonne-Paris IV en France, Université de Marrakech au Maroc, Universités en Tunisie, Instituts supérieurs en Egypte, Universités de Berkeley et Stanford, à San Francisco, à l'UCLA de Los Angeles, à la CUNY à New York, Rockefeller University à New York aux États-Unis, l'ULB à Bruxelles en Belgique, etc.

Expliquer l’Islam et non imposer l’Islam

Malek Chebel avait créé sa Revue. La revue Noor, (lumière en arabe) avait pour vocation dès sa naissance d’apporter sinon la lumière sur l’Islam du moins des lumières. En effet, le concept de « l’Islam des lumières », il y tenait comme à la prunelle de ses yeux. Au point d’en faire sa vocation première. « Il s’agit d’évoquer l’islam moderne, celui de la tolérance », explique l’écrivain algérien, auteur d’une trentaine d’ouvrages consacrés à l’islam et à sa place dans la société. « Le problème, analyse-t-il, c’est que les musulmans laissent le plus souvent le monopole de la parole aux plus extrémistes. Les modérés se plaignent de ne pas avoir un lieu pour s’exprimer. Je me suis dit qu’au lieu de se victimiser, il valait mieux créer son propre espace de réflexion ». Ainsi s’était-il confié au journaliste et écrivain français Pierre Cherruau.

Malek Chebel était un ardent partisan du débat. Il fallait pouvoir expliquer et convaincre plutôt que de vouloir imposer sa religion. Au risque même de la rendre répulsive. Pour lui, la question est simple : « Il faut instaurer un vrai dialogue. Je veux dire un débat libre, l’essentiel c’est que les intervenants aient des arguments de qualité ». Auant, il n’avait aucun problème a exprimé ses convictions religieuses, autant il estimait que les partis religieux n’avaient rien à voir dans l’arène politique. Et d’assener sans ambages : « Ils ont échoué en Egypte. La religion doit rester dans la sphère privée ».

L’essayiste n’était pas à l’abri des critiques. Loin s’en faut. Il était taxé par des islamistes d’avoir une conception plutôt libérale de la religion. Pour autant, ils n’avaient pas des arguments plus convaincants pour déstabiliser ce chercheur qui en savait beaucoup sur l’Islam, jusque dans les arcanes. Porté par sa foi et ses convictions, il a continué à professer son un « Islam des Lumières » qu’il appelait aussi de « l’Islam moderne ». Malek Chebel avait aussi publié, entre autres, Mohammed, prophète de l'islam, L'islam et la raison, L'Erotisme arabe, ou L'islam en 100 questions.

Il aimait écrire et travaillait beaucoup. A la suite de la parution de son ouvrage Cent questions sur l’Islam, Ed. de La Boétie, dans lequel il donnait des outils au lecteur afin de comprendre cette religion qui fait parfois peur aux Français, Malek Chebel confia : « J’adore faire de la pédagogie. Il n’y a pas de sujets tabous. J’aborde même régulièrement le thème de la sexualité. Mais c’est vrai que ma liberté de ton me vaut d’être fréquemment mal vu de dignitaires du monde arabo-musulman. Bizarrement, mes livres sont traduits dans une quinzaine de langues, mais pas en arabe. Je suis rarement invité à faire des conférences dans le monde arabe et on ne m’a jamais proposé de séminaire à l’université en Algérie, le pays où j’ai pourtant effectué la première partie de mes études supérieures ».

Décoré chevalier de la Légion d'honneur en 2008, alors que Nicolas Sarkozy était Président de la République française, il lui avait déclaré : « Grâce à vous, la France découvre, ou redécouvre, un islam qui connaît et aime la vie, le désir, l'amour, la sexualité ». Auparavant, en 2004, il avait également reçu le Prix des écrivains croyants pour son livre Manifeste pour un islam des Lumières.

Aujourd’hui, la Fondation Malek Chebel que préside son fils, Mikaïl Chebel, se charge de perpétuer la mémoire de cet illustre Anthropologe, Psychanalyste, Philosophe, spécialiste des Sciences politiques et Penseur de son temps. Et comme le souligne elle-même : « La Fondation Malek Chebel est un beau projet de pédagogie autour d’une vision du monde à la poursuite des lumières de la raison. Nous mettons notre joie de vivre au service de notre aspiration à une société tolérante et ouverte, où le vivre-ensemble repose sur la compréhension et la connaissance de l’autre. Il appartient à la société civile de s’emparer de la définition de son projet de vie commun, d’en dessiner un visage humaniste et universaliste. La Fondation se présente comme un vecteur de communication et d’échange, qui entend faire résonner les idées qui partagent l’ambition du rassemblement et de la fraternité ».

Fondation Malek Chebel

Adresse : 63 Voie des Sculpteurs, 92800, Puteaux, France 

Mail : fondationmalekchebel@gmail.com

Site Web : https://www.fondationmalekchebel.com/

Par Abdul Yazid

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