Les accidents de l’Histoire ont voulu que nombre de pays d’Afrique aient été des Colonies de la France. Par le passé. Non sans d’importantes résistances çà et là à travers le continent avant cette mise sous le joug. Il en a résulté, qu’on le veuille ou non, une relation toute particulière entre les anciennes colonies et la France. A quelque chose près, le Portugal, l’Espagne, le Royaume-Uni, bref les principales grandes puissances de l’époque, ont ce même type de relation complexe sans qu’elle ne soit pour autant complexuel avec les Etats qu’ils avaient soumis et dominés anciennement.
Les anciennes colonies de la France ont beau avoir des problèmes avec la France, elles ont besoin de la coopération de la France tout comme des autres pays développés dans leur proche marche en vue de leur émancipation. Il en va aussi de l’inverse. C’est le b.a.-ba de la Diplomatie. Ce n’est pas la Russie, et encore moins celle du Président Vladimir Poutine - dont on n’a vu nulle part au monde un seul exemple où elle a soutenu un peuple -, qui va venir sauver l’Afrique francophone. Bien au contraire. Aux peuples, elle a toujours privilégié les dirigeants aux pouvoirs. Des dictateurs qui pis est. La Syrie est l’exemple le plus patent : une honte pour toute l’Humanité - y compris pour chacun de nous individuellement au fin fond de l’Afrique -, car notre responsabilité est collective en abandonnant les Syriens entre les mains de Vladimir Poutine et du « Boucher de Damas » qu’il soutient, le Président Bachar el-Assad. Les Africains ne vivent pas à l’écart des vagissements du monde et sont tout aussi comptables de ce qui s’y passe. Et pendant que la Syrie est anéantie, exsangue et que son peuple souffre le martyr, nous avons détourné nos regards du sort des Syriens tout comme si de rien n’était.
En Afrique, on a beau montrer du doigt l’insécurité qui prévalait en Centrafrique pour justifier l’intervention des mercenaires russes de Wagner, elle n’aura permis qu’au Président Faustin-Ange Touadera de se maintenir au pouvoir pour un second mandat. En prenant la place de mercenaires aussi qui, eux, étaient des mercenaires africains soit dit en passant, et précisément d’Afrique du Sud. Mais en échange de quoi ?... Le secret l’emportant sur la transparence, l’on n’en sait pas grand-chose ou très peu. Toujours est-il que la Centrafrique vient de décider de l’enseignement du Russe dès la rentrée 2022-2023 comme discipline obligatoire à l’Université jusqu’au Master, et cela en remplacement de l’Espagnol. L’objectif étant de consolider les liens entre la Centrafrique et la Russie.
A propos des mercenaires russes, un rapport de l’ONU de 2021 a indiqué sans ambages que Wagner « harcèle et intimide » des civils et sont impliqués dans la torture et le meurtre de civils en Centrafrique. Sans compter que personne ne connaît les dessous du contrat qui les lie au régime en place, si ce n’est qu’il exploite un certain nombre de mines d’or du pays en échange. Et l’ONU d’inviter la Centrafrique à mettre fin à ses relations avec les mercenaires russes. « Selon le rapport du Service européen d’action extérieure, la Russie joue un rôle « ambigu et non transparent ». Il y a d’abord la présence d’environ 2 600 mercenaires du groupe Wagner qui ont aussi pris en main la formation de certaines unités militaires centrafricaines. Il y a également l’intensification de la présence russe « dans presque tous les domaines du gouvernement », la conduite de campagnes de désinformation et enfin son implication économique dans les douanes, les mines et plus généralement « l’exploitation des ressources naturelles ».
Au demeurant, l’on sait aujourd’hui que la Russie est indirectement responsable de la mort du Président Idriss Déby Itno du Tchad. D’aucuns diraient qu’il était un Dictateur. Et Vladimir Poutine alors ?...Dans sa volonté de s’implanter coûte que coûte en Afrique francophone, Vladimir Poutine ne lésine sur aucun moyen. A coups de manipulation de la jeunesse africaine par personnes interposées qui ne s’en cachent plus. On aurait pu en rire, si seulement l’on ne se jouait pas de l’Afrique et de l’avenir de sa jeunesse ainsi.
Tous ces jeunes africains auxquels l’on fait miroiter l’arrivée de mercenaires de la Russie pour sauver l’Afrique et auxquels l’on fait brandir des drapeaux russes çà et là savent-ils réellement ce qu’ils font ainsi en obéissant aveuglément à leurs manipulateurs ? Des marchands d’illusions ou de vent qui n’ont que seul fonds de commerce le discours anti-français. La Russie de Vladimir Poutine n’est porteur d’aucun modèle sociopolitique auquel aspirent les peuples de d’Afrique Noire, ou tout au moins ceux de l’Afrique Noire francophone. Et ça n’est que pur euphémisme ! Ceux qui ont manifesté à Kaya au Burkina Faso ou à Téra au Niger contre l’armée française ou ailleurs n’auraient jamais pu le faire ainsi si c’était en Russie. Il suffit que les Pouvoirs pro-russes s’enracinent en Afrique de l’Ouest et qu’ils donnent naissance à de « Petits Poutines » pour qu’ils s’en rendent comptent par un retournement de situation dont ils n’auront même pas le temps d’être surpris. Et ce serait bien trop tard. Hélas !...
« Vous dites souvent qu’un dangereux virus menace nos libertés partout dans le monde…le virus du mensonge et de la désinformation. A qui la faute ? Aux réseaux sociaux ? Oui ! Ces technologies font le lit de tout ce qui ne va pas dans le monde. Notre écosystème de l’information est dirigé par des décideurs qui ne font plus la différence entre des faits et la fiction. Ils privilégient des mensonges, car des mensonges qui attisent la colère et la haine circulent plus rapidement et plus facilement sur les médias sociaux. Cela doit changer. Je le répète depuis longtemps, nous avons besoin de réguler tout cela. Franchement, il faut que ça vienne des États-Unis. L’Union européenne est à la pointe de ce combat, avec « la législation sur les services numériques » qui observe la manière dont l’information est amplifiée par la puissance des algorithmes. Le Royaume-Uni prépare aussi une loi sur les informations diffusées en ligne. Je pense que la technologie a évolué avant même que les gouvernements et les citoyens ne se soient rendus compte qu’elle peut être utilisée pour nous manipuler insidieusement. Et cela doit s’arrêter ». C’est en ces termes que Maria Ressa, Prix Nobel de la Paix 2021 qu’elle partage avec le journaliste russe Dmitri Muratov a répondu sans ambages à la question à elle posée par Heïke Schmidt, le 10 décembre 2021.
Avant de prendre Vladimir Poutine comme le Messie de l’Afrique Noire francophone, les jeunes africains devraient chercher à savoir qui est le journaliste Dmitri Muratov, le cofondateur et rédacteur en chef de Novaya Gazeta, défenseur acharné de la liberté de la presse et la liberté d'expression en Russie.
Il ne s’agit pas ici de ne pas critiquer la politique française en Afrique. Il s’agit plutôt de critiquer tous les agissements dirigeants de la France mais avec des faits avérés et des preuves opposables à la France et non des Fake News pour utiliser cet anglicisme très tendance maintenant. Si, à la suite des Cheikh Anta Diop, Théophile Obenga et bien d’autres, l’Afrique Noire a le devoir de se battre contre la falsification longtemps entretenue sur son Histoire, elle ne saurait en revanche se complaire dans ce qu’elle n’a de cesse de dénoncer elle-même. Il est, par voie de conséquence, inadmissible de cautionner une falsification quelconque de l’Histoire contemporaine ou de l’Histoire de l’instant qui serait, cette fois-ci, le fait des Africains, fût-ce pour accuser la France des maux dont elle n’est ni entièrement ni clairement responsable. Surtout, qui pis est, quand il s’agit de mettre en selle non pas un pays appelé Russie mais la politique de son dirigeant nommé Vladimir Poutine.
Ce n’est pas parce que l’on est Africain qu’il faille soutenir des Africains même lorsque ce qu’ils disent n’est pas juste ou vrai. Sous des dehors de discours prétendument panafricanistes, les réseaux sociaux sont maintenant devenus un dépotoir de mensonges et de manipulation des jeunes particulièrement en Afrique Noire francophone qu’il convient d’élever au plus haut niveau la vigie à cet égard. Il est vrai qu’en France aussi, les discours de personnes à l’instar du journaliste politique et polémiste Eric Zemmour pour ne citer que celui-là parmi tant d’autres ne feront qu’attiser davantage la campagne anti-française en Afrique. Par son racisme primaire et sa tentation de passer pour plus Français que Français de souche, le raciste, antisémite et révisionniste et tous les chantres de son espèce ne feront ainsi que « détruire » progressivement les relations séculaires entre la France et ses anciennes colonies. En contribuant efficacement à distendre, voire couper définitivement ces précieux liens. Car le discours d’Eric Zemmour et tous les chantres de son espèce est le pendant ou le répondant exact de celui des Anti-Français en Afrique francophone.
Ce que l’Afrique Noire risque de perdre, si elle n’y prend garde en fantasmant la Russie ou encore la Chine, ce sont ses différentes formes d’organisations et de gestions sociales ainsi que ses espaces de liberté qui constituent des basses intrinsèques de sa Démocratie à l’Africaine. Certes, la Colonisation occidentale lui a déjà largement substituées à cela ses propres formes de gouvernance à l’Occidental, sans que pour autant elle ait jamais renoncé à ses aspirations fondamentales à la liberté des individus et la liberté de choix de leurs collectivités. Pire, l’Afrique Noire doit prendre garde à ne point tomber dans le piège infernal de régimes où la Dictature est le seul maître-mot de la gouvernance. Et des pays comme la Chine ou la Russie n’ont rien d’autre à proposer aux peuples africains qu’à renforcer les pouvoirs déjà autoritaires pour la plupart des Princes qui les gouvernent cependant que ces peuples seront en train d’applaudir contre l’Occident, verront leurs libertés s’amenuiser peu à peu jusqu’à s’étioler littéralement pour ne laisser la place qu’à une chape de plomb. Au motif que l’Occident a fait ci et ça ou couci-couça. Et ce serait bien trop tard pour faire machine arrière afin de retrouver les libertés perdues quand ces peuples-là s’en rendront compte au réveil de ce que la promesse du Développement par la Dictature n’est que de la poudre aux yeux. En somme, l’opium du peuple, pour ainsi dire.
On peut avoir quelque ressentiment vis-à-vis de la France, à juste raison parfois, sans pour autant distiller des informations mensongères dans le seul but de nuire à l’image de la France en Afrique. Par pure détestation ou vengeance quelconque. Que ceux qui ont des problèmes personnels avec la France, aillent les régler avec la France. Que ceux qui veulent travailler avec ou pour la France, travaillent avec ou pour la France. Que ceux qui veulent travailler avec ou pour la Chine, travaillent avec ou pour la Chine. Que ceux qui veulent travailler avec ou pour la Russie, travaillent avec ou pour la Russie. Aucun dirigeant, quel qu’il soit, n’est le propriétaire de son pays et encore moins éternel. Dans chaque pays, les citoyens sauront reconnaître les siens, ceux qui travaillent réellement dans l’intérêt supérieur de leur pays et non ceux qui font de la désinformation ou de l’intoxication au profit d’autres puissances étrangères dont ils ne seraient rien d’autre que des agents patentés. Mais les Africains n’ont pas à se plaindre de leurs propres faillites en accusant les autres...Chaque Africain, jeune ou non, devrait d’abord commencer par travailler pour son propre pays, et cela non pas en le prêtant comme terrain de jeu à quelque puissance étrangère que ce soit. N’en déplaisent aux Africains qui ont d’autres objectifs inavoués, faire croire que la Russie va sauver l’Afrique Noire francophone, c’est une imposture intellectuelle et une escroquerie politique de bas étage.
Vladimir Poutine n’est pas le meilleur porte-drapeau de la démocratie au monde, que l’on sache. Bien au contraire. Et ça aussi, ça n’est que pur euphémisme. Les Africains ne sauraient donc contempler les horreurs qui se déroulent en Ukraine comme un spectacle parmi tant d’autres horreurs du monde qui ne les regarde pas pour ensuite aller dormir sans frémir, tout simplement parce qu’elles se déroulent en Ukraine. Les Africains ne devraient au contraire pas seulement s’indigner des agissements consécutifs à son invasion de l’Ukraine mais aussi et surtout de tous à ses agissements en Afrique partout où l’Armée russe ou ses supplétifs se trouvent et opèrent. Si la Russie est éternelle, Vladimir Poutine, lui, n’est qu’un simple mortel. Quelle que soit la dimension de son ego ou de sa prétention à dominer le monde, du moins à écraser ceux qui lui résistent. Et il faut tout aussi plaindre beaucoup de Russes qui ne sont que des victimes de la politique intérieure et extérieure du maître actuel du Kremlin. Dont acte !
Serge-Félix N’Piénikoua