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POLITIQUE/TOGO : La gouvernance du coup d’Etat permanent de Faure Gnassingbé

Du projet de révision constitutionnelle à la révision constitutionnelle à proprement parler, le Président Faure Gnassingbé est toujours dans la même logique depuis sa prise du pouvoir au Togo. Après avoir écarté tous les potentiels rivaux dans son cercle familial, il entend bien garder la haute main sur le Togo à l’instar de son feu Père Gnassingbé Eyadema. Explications.

Après un premier vote intervenu le 25 mars dernier, non sans susciter un tollé, le Président Faure Gnassingbé avait demandé une deuxième lecture du texte le vendredi 19 avril dernier. Comme pour faire diversion sur le mécontentement des Togolais face à cette manœuvre politique dont la finalité est bien connue. En fin de compte, à la suite de la modification de quelques articles qui ne changent manifestement rien au fond du projet, le texte a été adopté à 87 voix. Qui pis est par des députés dont le mandat a déjà expiré.

Derrière la dernière révision de la Constitution du pays, beaucoup y ont vu la main et les conseils du Groupe Manssah. Basé à Lomé depuis 2023, le Groupe du journaliste camerounais Alain Foka et son équipe du Groupe Manssah, n’ont pas tardé à démentir les critiques. Des accusations balayées par M. Domche qui, à travers un communiqué de ladite société qui a déclaré notamment : « Mansssah, comme vous le savez depuis le début, travaille dans la transparence la plus totale. Nous ne sommes ni de près ni de loin impliqués dans ce qui se passe actuellement au Togo (…) Il était donc important pour nous de faire cette précision afin que personne ne soit dans l’ignorance. Le jour où Manssah sera impliqué dans une réforme constitutionnelle ou un projet de transformation institutionnelle en Afrique, vous serez les premiers informés. Nous ne travaillons pas dans l’obscurité »

Mais il n’en demeure pas que beaucoup de Togolais qui l’ont désormais affublé du surnom « homme d’affaires du panafricanisme » ont déjà un avis tranché. Y compris le journal Liberté qui croit que le confrère tente de faire ses affaires sur le dos de la souffrance des Togolais.

Tout compte fait, à la décharge d’Alain Foka et de son Groupe Manssah, on peut dire qu’il n’est pas le Président de la République du Togo, Faure Gnassingbé. Lequel doit être tenu pur seul responsable de ses actions à la tête de son pays, et cela quelque soient les conseils qu’il pourrait recevoir des uns et des autres, y compris de ses pairs chefs d’Etats de pays voisins ou lointains.

Après le tollé général suscité par la réforme constitutionnelle, le régime de Faure Gnassigbé l’a fait adopter par les députés acquis à sa cause en majorité. Faisant ainsi passer le pays d’un régime présidentiel à un  régime parlementaire. Avec à la clé le pouvoir désormais pour le Parlement d’élire le Président de la République. Et l’opposition au Président Faure Gnassingbé de crier au « coup d’État constitutionnel ». Car après 19 ans au pouvoir, il pourrait prétendre se faire élire encore et toujours à la magistrature suprême de son pays.

Le coup d’Etat permanent

« Cette adoption est la confirmation que le régime n'écoute pas les togolais. Il a préféré opérer un véritable passage en force, d'un coup d'État constitutionnel qui montre la véritable nature de ce régime. « À la DMP, nous ne baissons pas les bras du tout. Nous avons, avec les autres forces de l'opposition, intenté une action en justice auprès de la cour de justice de la Cédéao ». Telle é été la déclaration à RFI de Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson, juriste et figure emblématique de l’opposition togolaise, notamment la Dynamique pour la majorité du peuple. Et d’inviter les Togolais à se mobiliser pour sanctionner le régime à l’occasion des élections législatives du 29 avril 2024.

Faure Gnassigbé est arrivé au pouvoir par un coup Etat constitutionnel en 2005. En violant allègrement la Constitution togolaise sur plusieurs points, pour s’autoproclamer Président de la République en remplacement de son père défunt.  Il a fait évincer le Président du Parlement, Ouattara Fambaré Natchaba, qui était le dauphin constitutionnel. En se taillant une Constitution sur mesure, Faure Gnassigbé l’est resté jusqu’à ce jour. Sans compter les nombreux hold-ups électoraux et autres révisons des lois électorales du pays au détriment de tous les leaders de l’opposition togolaise.

Il avait beau déclarer «Je ne prépare aucun putsch contre Faure. J’ai certes des divergences avec lui sur la conduite du pays et du parti, mais je n’utiliserai pas la force contre lui. Sur le plan personnel, il est vrai que nous ne sommes pas proches, mais nous ne sommes pas obligés d’être des amis», lors d’une tentative de conciliation au Burkina Faso, face au Président Blaise Compaoré et à son ministre des Affaires étrangères, Djibril Bassole, au plus fort des rumeurs qui bruissaient sur un éventuel coup d’État en préparation, la fraternité n’aura pas suffi à sauver Kpatcha Gnassingbé.

Au-delà de cette révision constitutionnelle, l’attitude du Président Faure Gnassingbé à l’égard des régimes putschistes et militaro-civils qui se sont installés en Afrique de l’Ouest, notamment au Mali, Burkina Faso et Niger en disait déjà long. Les ressortissants de l’Afrique de l’Ouest et l’opinion publique africaine n’avaient de cesse de s’interroger sur les motivations réelles du chef de l’Etat togolais quant à son jeu face à cette régression démocratique dans la sous-région. Même si le Togo n’a jamais fonctionné démocratiquement, et encore moins organisé des élections démocratiques et justes.

La médiation intéressée de Faure Gnassingbé

Face aux coups d’Etat militaires que l’Afrique de l’Ouest a connus au Mali, au Burkina et au Niger, le Président Faure Gnassingbé du Togo a fait cavalier seul dans son positionnement. En se démarquant de ses pairs de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et des décisions de cette institution. Une stratégie qui interroge et qui divise, au-delà même des peuples de cette région.

Ils sont nombreux les ressortissants de l’Afrique de l’Ouest à se demander pourquoi le Président Faure Gnassingbé est aussi complaisant avec les putschistes ou les militaires. Lesquels remettent ainsi en cause les principes démocratiques si chèrement acquis dans leur pays respectif.  C’est désormais un secret de polichinelle que le chef de l’Etat togolais n’a jamais été intransigeant envers tous les militaires qui ont fomenté des coups d’Etat. C’est le moins que l’on puisse en dire. Que ce soit au Mali, au Burkina Faso, en Guinée ou encore au Niger, il aura eu des attitudes d’écoute, de conciliation, et en tout cas de refus de s’aligner derrière les positions de principe. Au point même de dérouter certains de ses pairs de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Tant le Togo n’a jamais suivi les décisions issues des sommets de cette institution à l’encontre des nouveaux pouvoirs militaires en Afrique de l’Ouest.

On pourrait penser tout simplement que c’est parce qu’il écoute ses chefs militaires. Car, bénéficiant d’une certaine proximité avec son armée, grâce à laquelle il est arrivé au pouvoir en 2005, il a choisi de ne pas condamner les putschs sans maintenir ouverts les canaux de négociations. Néanmoins, il faut y voir une stratégie bien réfléchie en amont. Faire en sorte que, en cas de besoin, il bénéficie de la même complaisance vis-à-vis de son régime dont la gouvernance est caractérisée par des coups d’Etat permanents.

Par Daniel Yaoni

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