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TRIBUNE : Africains, essayons de croire un peu en nous-mêmes

Savez-vous que dans les années soixante, les produits japonais étaient le prototype même de la mauvaise qualité ? Parce que les Japonais essayaient alors d’imiter les produits américains et ils n’y parvenaient pas encore. Mais à force de toujours remettre l’ouvrage sur le métier, ils ont fini par dépasser ceux qu’ils voulaient imiter.

Il en a été de même pour la Corée du sud. Lorsque je m’y suis rendu il y a une dizaine d’années, l’on m’a raconté qu’après la guerre qui a divisé la péninsule en deux Etats, la Corée du sud était tellement pauvre que l’on y mangeait des racines. Rappelons que la Corée avait été très durement colonisée par le Japon et jusqu’à présent, cette histoire représente un sérieux contentieux entre les deux pays. Mais lorsque la Corée a été libérée, après la Seconde guerre mondiale, elle n’a eu qu’une seule ambition : atteindre, sinon dépasser le niveau de son ancien colonisateur. Et elle y est parvenue. Aujourd’hui toute la haute technologie nous vient de la Corée du sud.

Il n’y a pas très longtemps, on parlait de « chinetoc » pour se moquer des produits fabriqués en Chine. Je me souviens de cet ambassadeur de la Chine en Côte d’Ivoire qui m’appelait pour protester chaque fois que le mot « chinetoc » était écrit dans Fraternité Matin, même pour plaisanter. Il refusait que l’on associe le nom de son pays à de la mauvaise qualité. Et il n’avait pas tort. Aujourd’hui, plus personne ne parle de « chinetoc », si ce n’est au passé. Nous voyons tous la qualité des produits que la Chine nous propose désormais.

Que s’est-il donc passé avec le Japon, la Chine, la Corée du sud ? Ils ont fait comme l’enfant qui veut marcher. Il se lève, tombe, se relève, tombe à nouveau, puis prend de plus en plus d’assurance et finalement, réussit à marcher correctement. Ils ont fabriqué des produits dont la qualité laissait à désirer. On s’est moqué d’eux. Ils se sont corrigés, ils se sont améliorés, et ils ont dépassé leurs modèles.

Il y a une quarantaine d’années, on fabriquait dans notre pays un véhicule tous-terrains que l’on appelait « Bandaman ». Elle était plutôt rudimentaire comme véhicule, mais assez solide et était excellente sur les pistes. Qu’est-elle devenue ? On se serait attendu à ce qu’aujourd’hui on l’ait améliorée pour en faire un véhicule sophistiqué. Mais elle a disparu. On a arrêté sa production, et aujourd’hui, on ne sait même pas fabriquer une bicyclette ou un jouet d’enfant en forme de voiture. Au lieu d’évoluer, nous avons au contraire régressé. Nous sommes de gros consommateurs de produits manufacturés et ceux qui ont de l’argent aiment les produits de très haute qualité. Mais aucun industriel ivoirien n’a jamais cherché à fabriquer une voiture, un vélo, une moto, un stylo, un gant, un pneu de vélo ou un préservatif, vu que nous sommes un gros producteur d’hévéa… Pour ce qui est de la recherche et de l’industrialisation, toute l’Afrique noire a totalement abdiqué. Nous attendons que ce soit les autres peuples, à savoir les Européens, les Américains, les Asiatiques ou les Arabes qui viennent le faire pour nous. Ou plutôt, qu’ils aillent le faire chez eux pour venir nous le vendre très cher. En Afrique du sud et en Afrique du nord, des efforts d’industrialisation sont faits. D’ailleurs ce sont des entreprises de ces pays qui viennent de plus en plus construire nos routes, nos ponts, exploiter nos minerais, etc.

Et si nous décidions cette année 2023 de commencer à changer un peu ? Et si nous commencions à essayer d’exploiter nous-mêmes nos ressources de manière un peu plus moderne que l’orpaillage ? Et si nous commencions à fabriquer nos produits de consommation ? Ils ne seront certainement pas de bonne qualité au début, et il nous faudra de longues années avant d’atteindre le niveau des autres pays. Ce qui est certain est que nous n’atteindrons jamais ce niveau si nous n’essayons jamais. Les autres sont là où ils sont parce qu’ils ont essayé. Ils n’ont pas eu peur d’échouer et de recommencer.

Africains, essayons de croire un peu en nous-mêmes. Convainquons-nous que chaque fois que nous puisons en notre propre génie, nous réalisons des merveilles. Oui, essayons.

Par Venance Konan

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