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TOURISME/AFRIQUE DE L’OUEST : Un secteur économique vital devenu la grande victime du Terrorisme

Comme toutes les destinations de l'arrière-pays ouest-africain, le secteur du tourisme au Burkina Faso a souffert des actions terroristes menées sur son territoire ces dernières années. Et cette situation n'est pas sans affecter toute l'Afrique de l'Ouest, y compris même les pays qui sont encore restés à l'abri des actes terroristes.

L'Afrique en général est encore très loin d'exploiter son énorme potentiel en matière de tourisme, dans tous les domaines de ce secteur. Dans le passé, ce n'était qu'un problème de manque d'infrastructures adéquates ou de publicité autour de ses actifs. Mais les choses ont beaucoup changé ces dernières années.

Les professionnels de l'industrie s'accordent à dire qu'elle est en augmentation sur tout le continent depuis plus de deux décennies. Cependant, cette progression est inégale et dépend aussi de facteurs qui dépendent des situations socio-politiques fluctuantes de nombreux pays, notamment en Afrique noire. Pourtant, ces dernières années, cette région d'Afrique avait quasiment supplanté les grands pays touristiques du Maghreb comme l'Egypte, la Tunisie et le Maroc en termes de progression du volume d'accueil touristique. A cause des problèmes politiques et de leurs conséquences inhérents au printemps arabe. L'Afrique noire avait ainsi enregistré selon les indications de la Banque mondiale 42 millions de visiteurs en 2017 contre 30 millions en 2007. Et parmi les pays bénéficiaires, il y a tout naturellement ceux qui garantissent la stabilité socio-politique en plus de disposer des infrastructures et du potentiel adéquats. pour les sites touristiques. Il convient de citer dans ce cas : les Seychelles (62% du PIB), le Cap-Vert (43%) et Maurice (27%). A ces pays s'ajoutent la Gambie, le Kenya, l'Afrique du Sud, le Botswana et la Tanzanie.

Ce sont moins les crises socio-politiques que les attentats ou les enlèvements d'Occidentaux, majoritairement issus de groupes dits djihadistes, qui ont freiné ce développement du secteur touristique en Afrique de l'Ouest. Le Mali et le Niger ont été les premières destinations à souffrir. Mais dès que le Burkina Faso a commencé à enregistrer les mêmes actions sur son territoire que ses voisins, toute la sous-région a été marquée en rouge par les chancelleries occidentales et certains voyagistes. A tel point que l'impact s'est fait sentir même en Côte d'Ivoire, plus loin de l'épicentre des actes terroristes et des enlèvements d'Occidentaux.

Tout a commencé au Burkina Faso en 2015. Et à la fin de cette année-là, l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) pourrait connaître une nette baisse de fréquentation. La conséquence directe de cette insécurité a été pour cette région la chute de 6% des activités touristiques par rapport à 2014 et la chute drastique des revenus du secteur qui ont chuté de 3% pour osciller autour de 920 millions de dollars. Quand on sait que plusieurs pays, en l'occurrence le Burkina Faso, tirent une bonne partie de leurs recettes touristiques de congrès et autres rencontres internationales, on mesure l'impact des actes terroristes qui n'ont cessé de frapper le pays à leur juste valeur sur le patrimoine national et l'économie sous-régionale.

Les actions des terroristes sont devenues plus audacieuses alors qu'ils s'efforcent de repousser les limites auxquelles ils étaient jusqu'alors confinés. La Côte d'Ivoire a été frappée à plusieurs reprises. Et des pays comme le Ghana et le Togo ont dû mettre leurs frontières sous étroite surveillance avec des patrouilles militaires. L'une des actions les plus audacieuses dont la République du Bénin a été témoin est la violation de son territoire à la frontière nord avec le Burkina Faso et le Niger. Cette vague terroriste a également commencé à se propager plus loin, vers les pays du golfe de Guinée. En mai 2019, deux touristes français Patrick Picque et Laurent Lassimouillas ont été enlevés dans le parc national de la Pendjari après la mort de leur chauffeur Fiacre Gbédji. Il a fallu l'intervention des forces spéciales françaises aidées de leurs homologues du Burkina Faso pour libérer les otages, au prix de la mort de maître Cédric de Pierrepont, 33 ans, et maître Alain Bertoncello, 28 ans, deux militaires français du commando. Ils étaient respectivement chef de groupe et membre du célèbre commando Hubert, l'unité d'assaut de Saint-Mandrier (Var) composée de nageurs de combat. Une mauvaise publicité dont le secteur touristique béninois n'a pas eu besoin et qui lui a valu d'être longtemps mis en zone rouge par le ministère français des Affaires étrangères. Cela a obligé le gouvernement de la République du Bénin et African Parks Bénin, qui gère ledit parc depuis 2017, situé à 650 km de Cotonou, 420 km de Ouagadougou et environ 490 km de Niamey, à renforcer les mesures de sécurité tout autour.

Certes, les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) appuyées par les Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) luttent vaillamment contre les terroristes au quotidien. Les armées nationales ont formé ce qu'on appelle le G5 Sahel en vue d'actions plus coordonnées pour faire face au phénomène du terrorisme, qui a des racines plus complexes. Mais malgré tout, l'insécurité règne toujours. Au point même d'entraver les déplacements à l'intérieur des territoires concernés.

Selon les informations de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), le rythme des flux touristiques vers l'Afrique de l'Ouest a enregistré une baisse de 70% en 2021. Et ce à cause de la pandémie de Covid-19, a indiqué Gustave Diasso, le représentant de la Commission de l'UEMOA. Selon lui, le Covid-19 a mis à genoux toute l'industrie du tourisme dans la région de l'UEMOA. « Des pays ont été impactés par le Covid-19. On peut citer la Côte d'Ivoire et le Sénégal. En plus de cela, d'autres problèmes, dont le terrorisme, ont affecté le tourisme dans certains pays. L'UEMOA, qui regroupe huit pays d'Afrique de l'Ouest, a mis en place en 2010 un Programme Régional de Développement Touristique (PRDTour). Avec pour objectif ultime de faire de cet espace communautaire un pôle de développement touristique en Afrique.

Il est difficile d'évaluer le coût actuel des pertes dans le secteur du tourisme dans chaque pays et globalement en Afrique de l'Ouest en l'absence de statistiques officielles et précises. Une chose est sûre et certaine, ils sont colossaux. En témoignent déjà les doléances des protagonistes du secteur, toutes professions confondues. Aujourd'hui, même avec une sécurité accrue et améliorée, il faudrait de nombreuses années pour que le tourisme retrouve son éclat et sa tranquillité d'antan.

Dans son rapport sur le Tourisme et la Sécurité en Afrique, l’Union africaine conclut en ces termes : « La compétitivité de l’Afrique en tant que destination touristique est largement influencée par, entre autres facteurs, la façon dont les touristes perçoivent leur risque ou le danger (que cela soit réel ou non) en visitant le continent. Étant donné le classement de l’indice de compétitivité du tourisme et du voyage très faible de l’Afrique, il est important que le continent mette en place des mesures pour examiner un certain nombre de problèmes y compris la sûreté et la sécurité limitées en matière de tourisme. En exploitant les cadres institutionnels et politiques de l’Union africaine, beaucoup pourrait être fait pour améliorer la sûreté et la sécurité du tourisme qui à son tour influencera l’aptitude de l’Afrique à maintenir une image positive, créer un environnement des affaires propice au tourisme et attirer l’investissement. La compétitivité de l’Afrique s’améliorera lorsque des stratégies bien conçues et coordonnées sur la sûreté et la sécurité seront mises en œuvre ».

Par Serge Félix N’PIENIKOUA

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