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NIGERIA : Au cœur de l’historique cité d’Abeokouta, en pays Yorouba

Abeokouta, la capitale de l’Etat d’Ogoun, est une ville importante non seulement en pays Yorouba, mais aussi parmi les villes du Nigeria. Et pour cause, la ville d’origine des Fela, Moshood Abiola, Wole Soyinka, Olusegun Obasanjo et bien d’autres est riche d’histoire.

 

Je retournais à Abeokouta, ville historique, ô combien présente dans l’histoire des peuples d’Afrique de l’Ouest, ville historique mais aussi importante dans tout le pays Yorouba au Nigeria, pour la deuxième fois de ma vie. Après plus de deux décennies. Quand je découvre pour la première fois le Nigeria en 1985, c’est par Abeokouta que j’arrive à Lagos via Imeko.

Pour beaucoup, Imeko peut ne pas dire grand-chose. Mais pour un Béninois, qui a connu qui plus est la période révolutionnaire où le marxisme-léninisme sévissait, qui a vécu l’agression armée des mercenaires de Bob Denard le 16 janvier 1977, ou encore qui connaît l’histoire du Christianisme céleste et qui compte aujourd’hui des millions de fidèles à travers le monde et principalement au Bénin et au Nigeria, Imeko peut évoquer beaucoup de choses. A commencer par le nom du prophète-pasteur Samuel Biléou Joseph Oshoffa. Né en 1909 au Bénin (ex-Dahomey), cet ancien charpentier (à l’instar du Joseph de la Bible) a fondé ce courant religieux le 29 septembre 1947 à Porto-Novo.

Il est mort à Imeko où il a été inhumé après avoir fui son Bénin natal, accusé par le régime marxiste-léniniste de l’époque de sorcellerie, et contraint à l’exil.

J’avais visité sa tombe avant de poursuivre mon chemin jusqu’à Abeokouta. Les Béninois connaissent Abeokouta, en particulier au travers de l’une des fameuses chansons guerrières du royaume du Dan Xonmè (Abomey). Par laquelle le royaume proclame qu’après avoir détruit Kétou (Bénin) et Oyo (Nigeria) – toutes des cités Yorouba -, Abeokouta (Nigeria) reste la seule ville à mettre à sac. Et pourtant l’armée du roi Ghézo d’Abomey essuiera une cinglante défaite lors de ses expéditions de 1851 et 1864 à Abeokouta. Grâce au soutien militaire que les premiers missionnaires britanniques apportent au peuple Egba contre son ennemi irrédentiste d’Abomey. Les antagonismes entre le pays Yorouba et le pays Fon du royaume du Dan Xonmè (Abomey) étant historiquement légendaires. Mais ça, c’est du passé.

Retour à Abeokouta
En me rendant à Abeokouta, je pensais trouver que la ville a beaucoup changé, au fil des années. Mais je dois avouer que j’ai été déçu sur ce point. La ville a gardé la même prestance que je l’ai connue. Avec ses allures de grande bourgade. Ce qu’elle a gagné en plus, c’est tout simplement en tentacules si j’excepte quelques nouvelles et belles bâtisses qui s’imposent au milieu de toutes ces maisons en toits de tôles rouillées comme des fantômes d’une nouvelle époque. Et je me fais cette réflexion : qu’ont-ils (les Yorouba) qui les lie tant aux toits de tôles rouillées, tant et si fort que c’est presque caractéristique des villes Yorouba dans leur ensemble : du Bénin tout comme du Nigeria. Un lien mystique ? Je n’en sais rien. Je suis né à Tanguiéta au milieu de Yorouba originaires de Saki, j’ai grandi parmi eux, et j’ai finalement étudié à Ibadan en pays Yorouba, mais je continue toujours d’étudier et de chercher à comprendre ce peuple à la fois très mystérieux, voire mystique mais aussi très ouvert…

Au lendemain d’Aké Arts and Book Festival of Abeokuta (Festival des Arts et du Livre Aké d’Abeokouta), je pars avec quelques autres écrivains et cinéastes à la découverte de l’historique Abeokouta. Même type d’habitat que chez moi, au Bénin, mêmes habitudes. « Tout même… », comme on dit en français africain du Bénin. Comme quoi, il y a en tout peuple même quand il forme des groupes disloqués et éloignés un fil commun et invisible qui le lie toujours à ses origines ou à ses habitudes ancestrales.

Abeokouta a produit de nombreuses et grandes figures du Nigeria dans divers domaines. Entre autres, il convient de mentionner Wole Soyinka, le premier africain Prix Nobel de Littérature, Moshood Kashimawo Olawale Abiola, Homme d’affaires, homme politique et vainqueur non déclaré de la présidentielle de 1993, Olusegun Obasanjo, ancien Président du Nigeria de 1976 à 1979 et de 1999 à 2007, Funmilayo Ransome-Kuti, Militante féministe et activiste des droits de l’homme, Jimi Solanke, Acteur et musicien célèbre, Toyosi Craig, Olikoye Ransome-Kuti, Professeur et célèbre médecin-pédiatre et ancien ministre de la Santé, Fela Kuti, Musicien célèbre et activiste politique, Ernest Shonekan, Homme d’affaires et ancien président par intérim du Nigeria.

Notre première visite, nous la dédions à la Librairie présidentielle d’Obasanjo. L’ancien président du Nigeria, Olusgeun Obasanjo, que l’on appelle ici affectueusement « Baba » (Ndlr : Père) dans sa région d’origine, et où il cultive son jardin – au sens propre comme au figuré du terme – dans sa ferme d’Otta ; a en effet décidé d’implanter sa Bibliothèque présidentielle. Il s’agit d’un grand domaine situé en plein cœur d’Abeokouta et qui inclut un promontoire rocheux de là-haut duquel l’on découvre une vue panoramique d’une partie de la capitale de l’Etat d’Ogoun. Ce grand complexe en chantier est destiné à abriter, à terme, un musée, une grande bibliothèque et un parc animalier.
L’idée de créer une Bibliothèque présidentielle dénommée Olusegun Obasanjo est née en 1988. Histoire d’immortaliser la liberté retrouvée de l’homme qui a été incarcéré sous le régime dictatorial du Général Sani Abacha pour un crime qui n’existe pas. Une bibliothèque présidentielle qui va rassembler ses documents personnels et bien d’autres documents d’archives susceptibles d’intéresser des chercheurs, surtout les générations futures. Car ils constitueraient ainsi d’importantes sources dans plusieurs domaines. L’imposant bâtiment à plusieurs étages qui doit accueillir cette masse d’information est encore en chantier.
Qu’à cela ne tienne, nous visitons d’abord le musée avec ses différentes pièces de collection déjà en place, et ensuite le parc animalier qui, lui, abrite déjà une faune variée : crocodiles, hyènes, babouins, autruches, etc. Au bout de la visite, comble de surprise : sur un rocher, il se dégage nettement des traces d’une présence humaine très ancienne sur les lieux, à travers d’anciens creux dans la pierre qui ont servi à moudre du grain. Les archéologues devraient se pencher sur ces traces manifestement très anciennes. Pour finalement nous dire de quoi ça retourne.

Les origines de l’Egbaland
Après cette visite, nous reprenons la route pour traverser la ville en direction d’Olumo rock. Nous dépassons la plus ancienne cathédrale du Nigeria. Première étape : le palais du roi d’Abeokouta : Aké Palace. Dans la vaste demeure du roi, l’« Alake of Egbaland » comme on dit ici, ce sont des pièces de différentes œuvres qui accueillent le visiteur…Par manque de chance, le roi n’est pas dans son palais. Et nous ne nous y attardons pas. Juste le temps de contempler certaines toutes ces pièces qui nous regardent fixement, et nous ressortons. C’est là que se trouve gardée, ironie de l’histoire, la plus ancienne Bible du Nigeria. L’on pense aussi que la fameuse Reine de Saba, la Balqis de la Bible serait enterrée dans les environs d’Ijebu dans l’Etat d’Ogoun. Après son long voyage qui l’aurait mené d’Ethiopie jusqu’à ces rivages d’Oke-Eri, elle y serait décédé par la suite. Mais rien n’est venu encore confirmer cette présomption.
Abeokuta, la capitale de l’Etat d’Ogoun, a été fondée vers 1825. A l’origine, c’est pour fuir les chasseurs d’esclaves du Bénin (ex-Dahomey) et d’Ibadan que les premiers occupants sont venus s’y réfugier. Sous la direction de Sodeke, le peuple Egba trouve que l’endroit au pied du rocher peut constituer une cachette sûre. Après l’effondrement de l’Empire d’Oyo, longtemps après la fondation de la première et originaire Cité-Etat d’Ile-Ifè. Olumo rock ou le rocher d’Olumo est ainsi considéré comme l’endroit emblématique de la naissance de la ville.
 
Par Marcus Boni Teiga, envoyé spécial
 

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